« La question de l’impact environnemental est plus spécifiquement celle des déchets générés par les interventions humanitaires est une problématique récurrente à laquelle se confrontent les acteurs de l’aide.
Sous l’impulsion du Réseau Environnement Humanitaires, le Groupe URD et l’ONG CEFREPADE ont élaboré une proposition de projet visant à améliorer la question des déchets humanitaires, et mené une première étude de cas (phase pilote) dans ce cadre sur la prise en compte de la question des déchets en Haïti où se trouve aujourd’hui encore, un grand nombre d’acteurs de l’aide. En effet, dans le cadre des activités de recherche opérationnelle de l’Observatoire Haïti et dans le contexte actuel de transition vers le développement, la gestion des déchets solides a été identifiée comme sujet de recherche pour 2014.
Malgré une forte volonté d’améliorer la manière dont sont gérés les déchets des organisations en Haïti, cette étude a montré une faible prise en compte de la thématique dans les pratiques et politiques des acteurs de l’aide. Ces derniers ont, dans leur globalité, peu conscience des déchets qu’ils produisent et de la manière dont ils sont gérés, au-delà du contrat qu’ils ont avec le prestataire de collecte. La faible connaissance des dispositifs de recyclage, du cadre législatif, des risques environnementaux et sanitaires, et le manque de temps et de compétences sont ressortis comme des obstacles majeurs.
La proportion de déchets des acteurs de l’aide a été estimée à 5% de la quantité de déchets générés dans la Région Métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui est assez faible. Mais les acteurs de l’aide produisent des déchets qui peuvent être extrêmement nocifs pour l’environnement s’ils ne sont pas gérés de manière adéquate, et les risques environnementaux et sanitaires associées à une mauvaise gestion sont très graves. En étant consommateur de polystyrène expansé (ex : boites à manger), ils cautionnent également à un marché illégal.
La thématique de la gestion des déchets des acteurs de l’aide soulève un questionnement sur la cohérence entre la prise en compte de la gestion de déchets au siège des organisations et celle sur les lieux d’intervention, où règne un certain « laissez faire » en évoquant un système public de gestion des déchets défaillant. Il est urgent pour les acteurs de l’aide d’avoir le même niveau d’exigence entre les pratiques exercées au siège des organisations et celles sur le terrain.
Par ailleurs, cette question soulève des contradictions entre les objectifs de certaines missions (acteurs intervenant dans le domaine de la santé, des déchets, de l’assainissement, etc.) ainsi que les valeurs portées par celles-ci, et leurs pratiques en matière de prévention et gestion des déchets. Il est important que les acteurs de l’aide se saisissent de cette question et s’interrogent sur l’étendue de leur responsabilité vis-à-vis des déchets qu’ils génèrent même si le contexte local est peu contraignant. Ceci implique une remise en question des pratiques actuelles de prévention et de gestion des déchets et la mise en place de politiques volontaristes. Les acteurs de la solidarité internationale en Haïti peuvent et doivent se servir de ce levier d’exemplarité afin d’encourager les décideurs politiques, populations bénéficiaires et la population haïtienne dans son ensemble, à adopter des pratiques plus respectueuses de l’environnement. »
Texte tiré du site internet de l’URD, où vous trouverez également l’étude au complet (publiée en février 2015) : http://www.urd.org/Etude-sur-les-pratiques-de-gestion